Minéralogie en vallée de Chamonix-Mont-Blanc (74)

Philippe Berger-Sabatel


Philippe Berger-Sabatel, membre de la commission Minéralogie, est un amoureux de la vallée de Chamonix et des minéraux. Il commence par un rappel sur la géologie de la haute vallée de l'Arve et les phases tectoniques qui l'ont affectée. Puis il décrit les accidents susceptibles de contenir des cristaux : les fentes alpines et les fameux "fours".

Les fentes alpines sont des diaclases (fractures) produites par des tensions au sein de la roche. Elles peuvent être remplies par des minéraux formés à partir des circulations hydrothermales avec remobilisation de la silice et se présentent sous forme de filons de quartz subhorizontaux pouvant atteindre une longueur de 30 m et une épaisseur d'un mètre. Le granite encaissant est altéré et poreux. Dans le massif du Mont-Blanc, ces fentes sont datées de la limite du Miocène inférieur et moyen (18-20 Ma), alors que le granite est stéphanien (environ 300 Ma).

Les géodes tapissées de cristaux sont appelés localement des fours. Ces cavités naturelles, situées dans des filons de quartz ou à proximité, sont en général étroites et assez profondes. Il faut être alpiniste pour y accéder et leurs dimensions rendent la récolte des cristaux très difficile (un four de grande taille peut atteindre 5 à 6 mètres de long pour seulement quelques décimètres de large et de haut).

Il existe deux types de fours, correspondant aux deux minéraux dominants :

Philippe Berger-Sabatel montre ensuite plusieurs photos de cristaux remarquables : quartz (peigne, enfumé, à âme, morion), fluorite rose (et verte), minéraux accessoires (calcite, hématite, anatase, etc.). Puis il évoque le très beau Musée des Cristaux de Chamonix.

On ne peut faire aujourd'hui une présentation des minéraux du Mont-Blanc sans mentionner la nouvelle pièce acquise par le Muséum, grâce au mécénat de la Fondation Total. Il s'agit d'un cristal de quartz enfumé associé à des octaèdres de fluorite rouge. La qualité des cristaux est exceptionnelle et l'ensemble est particulièrement esthétique, ce qui lui vaut le statut de bien culturel d'intérêt patrimonial majeur.

La pièce a été découverte en 2006 dans les Aiguilles Vertes, par Christophe Peray. Il l'a appelée Laurent, en hommage à Laurent Chatel, son compagnon de cordée qui a fait une chute mortelle en 2005 alors qu'ils cherchaient ensemble des cristaux. Elle est exposée au Muséum, depuis le 6 avril 2010, grâce à la ténacité de Pierre-Jacques Chiappero, Maître de conférences au MNHN, qui a su convaincre son propriétaire de s'en séparer.



Coupe type d'un four à cristaux
(d'après Bull. Club Minéralogie de Chamonix. 1970. Remanié)


La nouvelle acquisition du Muséum (2010)
Quartz enfumé et octaèdres de fluorite rouge